Vendredi dernier je me suis rendu au premier
CodeRetreat en France organisé par Johan Martinsson, Remy Sanlaville et Miguel Moquillon, avec le soutien du
CARA et
Alpes JUG - merci tout le monde !
En résumé, le CodeRetreat consiste à enchaîner des itérations d'une heure en pair-programming et Test-Driven Development sur le même problème tout au long de la journée. Le problème choisi était le
jeu de la vie, qui a les avantages d'offrir plusieurs approches possibles et d'être assez complexe pour ne pas être résolu en 45mn.
Chaque itération se déroule de la manière suivante:
- Constitution des binômes (on change à chaque itération).
- 45mn de programmation.
- 15mn de rétrospective.
C'est agile, le temps est chronométré (belle organisation).
A la fin des 45mn de programmation, le code est effacé. Comme l'a répété Johan, ce n'est pas le résultat qui compte, mais la démarche, l'approche du développement qu'on doit s'efforcer de faire le plus parfaitement. C'est à dire:
- développement piloté uniquement par les tests
- pas de duplication de code
- noms clairs et significatifs
- code le plus simple possible
Côté langages nous avions beaucoup de Java. Miguel et moi en avons profité pour faire découvrir Pharo / Smalltalk et faire une session ensemble en Haskell. Il y a aussi eu un peu de Ruby.
Les 15mn de rétrospective permettaient d'échanger sur les différentes approches, les difficultés rencontrées, succès. On voit bien qu'il y a plusieurs manières d'attaquer le problème. Au fur et à mesure des automatismes se mettent en place ce qui permet de gagner du temps pour aborder d'autres aspects du problème.
Suit ce que j'en retire.
Pair-programming:
Chaque session se déroulait avec un binôme différent et chaque expérience, démarche a du coup été significativement différente. J'ai rencontré plusieurs cas:
- une personne qui a l'idée et une autre qui suit: c'est du coup souvent la personne qui veut voir son idée réalisée qui pilote et qui tape. La personne qui suit dépense beaucoup d'énergie pour rester dans le coup (j'ai été dans cette position sur une session). Il est nécessaire que la personne qui pilote temporise.
- deux personnes qui ont des idées: cela amène assez vite a quelques débats sympathiques mais c'est l'expérience qui me semble la plus enrichissante, d'où émerge des solutions de type "waouh, ça c'est cool".
- deux personnes ont la même idée, suivent la même route: dans ce cas c'est plus la volonté de bien faire qui ressort et la recherche de qualité / perfection dans la démarche est vraiment élevée
Dans tous les cas, il y a toujours une bonne ambiance à coder avec des inconnus :)
Test-Driven Development:
Je suis convaincu de la démarche et la pratique depuis que j'ai lu eXtreme Programming de Kent Beck vers 2002/2003. Donc je fais partie des gens qui ont des automatismes assez arrêtés sur le sujet :). Pour avoir vu d'autres façons de faire au cours de la session, je reste persuadé que la manière la plus claire est d'avoir:
- un TestCase par contexte. Le setUp établit le contexte, les tests font les vérifications.
- un assert par test. Avoir plusieurs assert doit rester exceptionnel car ça complexifie les tests (ce n'est pas interdit, mais il faut avoir conscience du compromis).
Un exemple concret est la règle:
"Si une cellule a exactement deux voisines vivantes, elle reste dans son état actuel à l’étape suivante".
Avec Rémy nous avons codé comme suit (grosso modo, le code a été effacé :)
ALivingCellWithTwoOrThreeLivingNeighbours>>#testShouldLive
|aliveCell|
aliveCell := Cell new revive.
self assert: aliveCell isAlive.
2 to: 3 do: [:numberOfNeighbours|
aliveCell numberOfNeighbours: numberOfNeighbours.
self assert: aliveCell shouldLive.
]
Le soucis c'est que quand le test est en échec, il faut débugger pour savoir si ça coince pour deux ou trois cellules.
Dans ce cas je préfère avoir deux cas:
- ALivingCellWithTwoLivingNeighbours
- ALivingCellWithThreeLivingNeighbours
Ceci dit cela risque d'amener une duplication de code, vu que les tests sont identiques dans chaque cas. Une solution codée avec Aline est d'utiliser des Traits pour définir les tests de manière générique puis de mettre seulement les différences dans les TestCase.
Trait named: #TCellIsAliveAndShouldLive
TCellIsAliveAndShouldLive>>#testIsAlive
self assert: self aliveCell isAlive
TCellIsAliveAndShouldLive>>#testShouldLive
self assert: self aliveCell shouldLive
TCellIsAliveAndShouldLive>>#aliveCell
self explicitRequirement
Du coup pour nos cas de test:
TestCase subclass: #ALivingCellWithTwoLivingNeighbours
uses: TCellIsAliveAndShouldLive
ALivingCellWithTwoLivingNeighbours>>#aliveCell
^ Cell new
revive;
numberOfNeighbours: 2.
de même:
TestCase subclass: #ALivingCellWithThreeLivingNeighbours
uses: TCellIsAliveAndShouldLive
ALivingCellWithThreeLivingNeighbours>>#aliveCell
^ Cell new
revive;
numberOfNeighbours: 3.
Approches
Les deux approches principales consistaient à commencer par implémenter la Cellule ou bien la Grille / Univers. Il était aussi possible de passer par une classe Neighbours intermédiaire.
Haskell qui est un langage fonctionnel permet d'avoir une approche par les ensembles.
Une solution liée à l'imagerie en travaillant en binaire a été évoquée mais pas implémentée à ma connaissance.
Pour simplifier l'algorithme qui calcule si la cellule doit vivre ou mourir en connaissant son état actuel et le nombre de ses voisins vivants, deux variantes:
- avoir deux classes LiveCell et DeadCell qui ont chacune leur algorithme
- implémenter le pattern strategy et donc un objet Cell utiliserait soit un DeadCellStrategy, soit un LiveCellStrategy. Ceci à l'avantage de ne pas avoir à changer le type des instances dans la grille
Avec Smalltalk une solution utilisée pour implémenter le pattern strategy se basait sur les Closures et évitait de créer des classes supplémentaires:
Cell>>#liveCellStrategy
^ [(liveNeighbours < 2) or: [ liveNeighbours > 3 ]]
Cell>>#deadCellStrategy
^ [(liveNeighbours = 3) not]
Cell>>die
shouldDieStrategy := self deadCellStrategy
Cell>>revive
shouldDieStrategy := self liveCellStrategy
Cell>>#shouldDie
^ shouldDieStrategy value
Bilan
Journée enrichissante et éreintante. La retrospective finale en a un peu pâti vu que tout le monde était fatigué. Une proposition d'amélioration qui me plaît est de découper la session de 45mn en deux pomodoro de 20mn pour ménager notre énergie.
Quelques "Smalltalk c'est cool" font plaisir ;)
En tout cas je reste convaincu par l'approche pair-programming qui est trés enrichissante et donne du courage pour explorer de nouvelles pistes et aller plus vite (car on se perds moins).
C'est dans ces moments là qu'on sent que la programmation est un artisanat au sens noble du terme, où la beauté du résultat est une source de motivation.
Par
@bootis quality = you know why it works
Le compte-rendu de Johan